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L'inespérée
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20 avril 2010

Eglantine

II.

Je suis retourné à l’hôtel. L’Hôtel de Paris. Comme par hasard. Le service du soir venait de commencer. Quelques clients à l’entrée de la salle. Mais pas d’Eglantine. Instinctivement, je suis allé vers le fond, m’asseoir à la table près de celle, vide, où je l’avais vue une heure plus tôt. J’ai pris ma commande, et j’ai demandé à la serveuse si la journée avait été bonne, s’ils avaient eu du monde en salle.

- Non, aujourd’hui ça a été plutôt calme. Une dizaine de tables. Mais nous avons quand même eu une table de huit pour un anniversaire…

Dehors, à mesure que je passais de mon assiette à la fenêtre, la nuit s’est mise à tomber. J’avais espéré la revoir, dans la rue, ou qu’elle ait pris une chambre ici. Mais il fallait bien que je me fasse une raison : j’avais encore loupé l’occasion unique de la rencontrer, de lui dire deux mots. Tout cela était d’une puérilité confondante, et je finissais par sourire de mon éternel désoeuvrement sentimental, de cet amour infini des actrices, qui m’avait toujours habité, sans qu’évidemment rien n’en ressorte d’autre que la frustration et la sensation amère d’impuissance face à ces apparitions illusoires, ces images féminines qui me fascineraient visiblement pour toujours et à jamais. Qu’aurais-je bien pu lui dire ? Et puis elle était avec ses amis ou sa famille. Comme au lycée, j’aurais eu l’air d’un imbécile si j’avais seulement tenté de l’aborder.

Il n’était plus question de reprendre la route. Autant passer la nuit ici. J'ai pris une chambre et suis sorti fumer en faisant quelques pas. Je pensais à la première fois où je l’avais vue, dans une adaptation d’une nouvelle de Maupassant. Puis quelques apparitions ça et là, mais jamais de grands rôles. Une jeune actrice essentiellement utilisée pour sa plastique, comme souvent, mais aussi une présence qui m’avait marqué, et qui me faisait me rappeler d’elle, même au bout de dix ans. Tout en fumant, je m’étais mis à marcher vers la mer. Il faisait nuit, et les réverbères allongeaient les ombres sur le trottoir. La plage était déserte. Seuls le vent et le fracas des vagues au loin venaient perturber la tranquillité de la station qui semblait endormie. Je me suis assis sur un banc un moment. Lorsque je venais ici auparavant, je passais des heures le soir à lire seul sur un banc. Je suis descendu sur la grève, et j'ai marché jusqu’à la mer, à marée basse. Qu’est-ce que je faisais là ? Très franchement, je ne savais plus trop, mais ce n’était pas bien grave. Demain, je partirais dès le réveil.

Je suis resté quelques minutes devant l’écume, à ne plus penser à rien, puis j'ai fais demi-tour. C’est alors que j'ai aperçu une silhouette qui marchait seule sur la promenade. La silhouette d’une femme. Je me suis mis à frissonner, mon sang se glaçant aussitôt : je savais que c’était elle, sans l’avoir encore distinguée. Si nous continuions à marcher chacun de nôtre côté à la même allure, nous nous croiserions au niveau du Grand Hôtel. Je me mis à paniquer devant cette éventualité. Mais elle sous la lumière des réverbères, et moi dans la nuit, elle ne devait pas m’avoir vu. J'étais rassuré et m’arrêtais pour la prendre en photo. Elle était seule. Je zoomais : c’était bien elle. Seule, sans ses amis. Il n’y avait personne d’autre aux alentours. Si j’en avais le courage, c’était le seul et unique moment pour tenter de l’aborder. Juste avant l’esplanade de l’hôtel, elle a disparu dans la ruelle qui menait vers la place. Je décidais de la rattraper...

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Commentaires
G
Merci :)
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L
Bon ben je vais écrire la suite alors.<br /> Bonne nuit Cécile ;)
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G
Le mot drôle pour moi ne s'accorde pas au mot risible.<br /> Dans risible, il y a du mépris et dans drôle, plutôt de la tendresse.<br /> <br /> Oui c'est cela, je trouve tes récits attendrissants :)
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